Le « laisser-pleurer » (Cry It Out), une méthode qui ne cesse de faire couler de l’encre et de diviser les parents ! Est-ce une solution miracle pour des nuits paisibles ou une méthode barbare aux conséquences désastreuses ?
Souvent associée à des techniques de « sleep training » comme Ferber ou la méthode 5-10-15, cette approche soulève autant d’enthousiasme que d’inquiétudes. Alors que certains y voient un moyen efficace d’encourager l’autonomie au coucher, d’autres s’alarment des potentiels impacts sur le développement émotionnel de l’enfant.
Face à ces avis contradictoires, que nous disent les études sur le « laisser pleurer » ?
Les secrets des cycles de sommeil de bébé
Les nouveau-nés et les jeunes bébés ont des cycles de sommeil très différents de ceux des adultes. Il est tout à fait normal pour un bébé de se réveiller plusieurs fois par nuit, en raison notamment de besoins physiologiques tels que l’alimentation. Cependant, pour vous, parents, ces réveils répétés peuvent être épuisants, vous menant à rechercher des méthodes pour améliorer le sommeil de votre enfant.
Heureusement, c’est là qu’interviennent les techniques d’apprentissage du sommeil ou « sleep training », qui visent à enseigner à vos bébés à s’endormir et à se rendormir seuls, sans avoir besoin de votre intervention. L’objectif est d’amener votre enfant à l’apprentissage de l’endormissement autonome, une capacité qui lui permet de retrouver le sommeil après un réveil nocturne sans avoir besoin de votre présence.
Parmi ces méthodes, certaines, plus controversées, impliquent de laisser pleurer votre bébé, avec peu ou pas d’intervention de votre part.
Les preuves scientifiques positives en faveur du « laisser pleurer »
Plusieurs études ont examiné les effets à court et long terme des méthodes basées sur le « laisser pleurer ». En 2016, une étude australienne publiée dans Pediatrics a montré que la méthode d’extinction graduée et celle des « réveils programmés » n’avaient pas d’effets négatifs significatifs sur le niveau de stress des bébés, ni sur le lien d’attachement parent-enfant (1). L’étude a révélé que les bébés qui avaient suivi un « sleep training » pleuraient moins la nuit et que leur sommeil était globalement de meilleure qualité après quelques semaines d’entraînement.
D’autres recherches, comme une étude menée en 2012, ont suggéré que l’apprentissage du sommeil avec des méthodes basées sur l’extinction complète n’entraîne pas d’effets psychologiques négatifs à long terme, notamment en ce qui concerne la production de cortisol, l’hormone du stress (2).
Une autre étude, menée par Hall et al. (2015), a démontré que les interventions de « sleep training » amélioraient votre perception concernant la sévérité des problèmes de sommeil de vos bébés, tout en réduisant vos niveaux de dépression, de fatigue, et en améliorant la qualité de votre sommeil (3). Les enfants ayant participé à ces études n’ont montré aucune différence dans leur développement émotionnel à cinq ans par rapport à ceux qui n’avaient pas été soumis à des méthodes d’apprentissage du sommeil.
La méthode du « laisser pleurer » sous le feu des critiques
Malgré des résultats positifs montrant que la méthode du « laisser pleurer » améliore la qualité du sommeil des bébés, cette approche reste vivement débattue. Certains experts soulignent que laisser pleurer votre bébé peut entraîner une augmentation du cortisol, l’hormone du stress. Par exemple, une étude de Middlemiss et al. (4) a révélé que, bien que vos niveaux de stress diminuent après plusieurs jours de « sleep training », les niveaux de cortisol chez vos bébés restaient élevés, suggérant une forme de stress continue.
De plus, des critiques craignent que cette méthode puisse perturber l’attachement entre vous et votre enfant. Les premières années sont cruciales pour développer un sentiment de sécurité chez votre enfant, et ignorer ses pleurs pourrait, selon certains, entraîner une détresse émotionnelle (5). Bien que certains résultats ne montrent pas d’effets négatifs durables, comme l’a souligné l’étude de Quante et al. (6), la question reste ouverte quant aux répercussions à long terme.
Malgré tout, plusieurs études, dont celle menée par Gradisar et al. (7), montrent que ces méthodes peuvent avoir des bénéfices pour le sommeil de vos bébés et votre santé mentale. L’essentiel est de choisir une méthode adaptée aux besoins et au bien-être émotionnel de votre enfant tout en tenant compte des preuves disponibles.
Les méthodes alternatives pour minimiser les pleurs
Face aux controverses, de nombreuses méthodes alternatives au « laisser pleurer » ont été développées. Des approches comme la méthode sans pleurs ou le retrait progressif du cododo cherchent à minimiser ou à éviter complètement les pleurs, en permettant une transition plus douce vers un endormissement autonome. Ces méthodes prennent souvent plus de temps, mais elles sont sont privilégiées par les parents qui veulent éviter le stress excessif pour leur enfant ou ne supportent pas de le laisser pleurer.
De plus, des experts recommandent de suivre des routines régulières et des pratiques favorisant un environnement propice au sommeil avec l’instauration de rituels apaisants (bain, histoire) et la réduction des stimuli lumineux avant le coucher. Cela pourrait aider votre enfant à développer des habitudes de sommeil saines sans avoir à recourir aux méthodes plus controversées.
Méthode | Description | Résultats attendus | Avantages | Inconvénients |
---|---|---|---|---|
Méthode No Tears | Techniques douces (bercement, allaitement) pour endormir bébé, avec sevrage progressif. | Plusieurs semaines à mois | Respectueuse des émotions, lien renforcé. | Prend du temps, bébé dépend de l’intervention parentale. |
Pick-Up/Put-Down (PUPD) | Prendre bébé quand il pleure, le calmer, et le reposer dans son lit. | 1 à 2 semaines | Favorise l’auto-apaisement. | Épuisant pour les parents avec pleurs répétés. |
Retrait progressif du cododo | Réduire progressivement la proximité avec bébé pour l’habituer à dormir seul. | Quelques semaines | Transition douce, réduit le stress. | Prend du temps, nécessite cohérence. |
Méthode de la chaise | Rester près du lit de bébé, puis reculer progressivement chaque nuit. | 1 à 3 semaines | Rassurante, bébé gagne en autonomie. | Peut rendre bébé dépendant de la présence physique du parent. |
Bedtime fading | Retarder progressivement l’heure de coucher pour que bébé soit naturellement fatigué. | 2 à 3 semaines | Adaptation au rythme de bébé. | Nécessite une surveillance attentive des signes de fatigue. |
Laisser pleurer ou réconforter : trouver votre propre équilibre
Le débat autour du « laisser pleurer » est complexe, car il implique de trouver un équilibre entre votre besoin de sommeil et le bien-être de votre enfant. Si certaines études ne montrent pas d’effets néfastes à long terme, d’autres soulignent les risques potentiels liés au stress. La décision finale dépend de vos croyances et de votre compréhension des besoins de votre enfant.
Ce qui est certain, c’est qu’il n’existe pas de solution universelle. Il est essentiel de choisir une méthode avec laquelle vous vous sentez à l’aise, en prenant en compte les preuves scientifiques disponibles et en restant attentif aux besoins de votre bébé. L’observation et l’adaptation sont clés : il n’y a pas de règle stricte sur la durée des pleurs avant d’intervenir. Même si votre bébé apprend à s’endormir seul, des changements naturels peuvent encore perturber son sommeil.
Enfin, soyez rassurés, aucune étude scientifique ne prouve que le « laisser pleurer » nuit au développement de l’enfant à long terme. Faites le choix qui convient le mieux à votre famille, en vous informant et en restant à l’écoute de votre bébé.
Sources
- « Behavioral Treatment of Bedtime Problems and Night Wakings in Infants and Young Children » (Mindell et al., 2006)
- « Longitudinal Study on Sleep Training in Infants: Impact on Sleep Duration and Parent-Child Relationship » (Mirja Quante et al., 2021)
- « Is It OK to Let a Baby ‘Cry It Out’? » (Middlemiss et al., 2012)
- « A Randomized Controlled Trial of an Intervention for Infants’ Behavioral Sleep Problems » (Wendy A Hall et al., 2015)
- « Longitudinal Study on Sleep Training in Infants: Impact on Sleep Duration and Parent-Child Relationship » (Mirja Quante et al., 2021)
- « Infant Sleep and Parental Sleep: Impact of Infant Sleep Training » (Gradisar et al., 2016)